La bourse et la vie. Toulouse 2012
La bourse et la vie. Toulouse 2012
La bourse du cercle T de Toulouse. Mars 2012
Photos et texte de C Camberoque
Nous arrivons à Toulouse, la veille, le vendredi.
Mon ami Jean-Louis a prévu de vendre quelques pièces et machines et m’a proposé de l’accompagner puisque je ne connais pas cette bourse qui figure depuis longtemps comme un rendez-vous incontournable.
Cette année, c’est la 27 ème édition de ce rassemblement qui a changé plusieurs fois de nom et de lieu d’implantation depuis presque une trentaine d’année d’existence.
L’organisation par le Cercle T de Toulouse est impressionnante. Elle attire des centaines de participants et des milliers de visiteurs. Personnellement je n’avais jamais vu une aussi grande manifestation de ce type.
Située sur le parking Sud du Zénith, les organisateurs exigent que les participants n’amènent que des motos et pièces antérieures à 1980. Des bénévoles et une société de surveillance s’occupent de veiller sur ce point et précisent qu’il n’y aura pas de dérogation à ce principe qui semble effectivement plutôt respecté. Et c’est très bien ainsi !
Dès le samedi, c’est l’équivalent d’une véritable concentration car beaucoup de motards du Sud-Ouest viennent faire leurs achats. Parmi eux beaucoup de belles machines et en particulier beaucoup de side-cars particulièrement soignés.
Plusieurs sides également à la vente dans la bourse. Soit des paniers, seuls, soit des machines attelées. Preuve qu’on aime particulièrement cet engin dans le Sud-Ouest.
Dès le vendredi soir, les vendeurs les plus avisés sont arrivés et installent leur stand.
Ici, on bichonne une 1000 Ariel Square Four,
Là, on installe de splendides pompes à essence.
Et le lendemain à l’aube on découvre les étalages avant d’aller faire un petit tour pour trouver et conclure les bonnes affaires, préalablement à l’arrivée plus tardive des badauds et acheteurs… optimistes.
Des motos attirent mon attention.
Une Moto Rhony’x, malgré son nom, qui fait presque exotique. Non!!! Ce n’est pas la moto d’Astérix ! C’est une marque fabriquée dans la région Lyonnaise.
Plus loin une Stylson avec une plaque des Bouches du Rhône.
Puis une jolie OMB Broglia que je découvre. J’en avais jamais vu. Une machine de course pas très courante par chez nous. Sa restauration paraît parfois exagérée avec des pièces qui ne semblent pas d’époque mais elle est aussi belle que rouge !
Et puis sur une remorque une Magnat Debon voyage en compagnie d’une Aermacchi comme j’en rêve !!!
Depuis ma première moto, (la Ténor rouge, comme vous savez) on dirait que je ne rêve que de motos rouges et plutôt Italiennes comme cette bien triste Motobi. Encore rouge et avec un cylindre horizontal. J’ai failli craquer.
J’ai failli aussi me laisser tenter par cette Matchless. Avec un guidon plus raisonnable elle ferait mon bonheur même dans son jus actuel.
D’autres ont des rêves plus abordables et à la portée des petites bourses une mob les fait déjà fantasmer…
Mais dans le fond pourquoi vient-on sur une bourse ?
Peut être pour rêver… essentiellement…
Et c’est ce que font la plupart des visiteurs.
Alors quand on peut enfourcher une bécane et faire la limande ; même si on reste sur la béquille on gagne la course et on est heureux…
… Une bourse c’est une immense salle de jeux.
Une scène où se donne une représentation ou tout le monde joue.
Tout le monde vient jouer ou rejouer un personnage. L’ouvrier vient sur son Harley rutilante qui lui a coûté de nombreuses heures de travail mais sur laquelle il semble un vrai américain de Californie, lui qui habite Sesquière ou Pinsaguel. Le toubib vient sur sa BM en Barbour graissé pour se changer de l’éternelle blouse blanche. Puis il y a les fanatiques de Rossi sur des Ducatis préparées comme s’ils partaient pour un grand Prix et qui friment ostensiblement à chaque démarrage comme s’ils ne pouvaient pas démarrer plus doucement…
Il y a aussi tous les vieux motards défroqués (comme moi) qui racontent leurs exploits d’antan : Leurs courses de vitesse entre deux concentrations, à l’époque bénie ou il n’y avait pas de limitation. Avec force détails, ils évoquent certains virages pris en dérapage et avec des angles à faire frémir Max Biaggi. Des vitesses hallucinantes prises sur la N 20 entre Toulouse et Montauban…
Ce genre de rassemblement est une fête, c’est une véritable représentation donnée par les héros méconnus du bitume et du guidon bracelet.
Finalement une bourse c’est bien le spectacle en direct live du Joe Bar Team…
… Et puis il y a les vendeurs que l’on peut classer en deux catégories :
Les marchands, les pros, les vrais
et les autres petits ou très grands collectionneurs qui peuvent à la fois vendre ou acheter.
Les grands collectionneurs qui sont parfois plutôt friqués ont une panoplie, un costume de scène qui est sensé leur procurer une espèce de tenue de camouflage pour pas avoir l’air trop riche ou trop branché. Alors là, il faut les voir inspecter les stands d’un air de rien, sabots aux pieds, blouson crade et élimé sur le dos.
Une sempiternelle clope papier maïs au bec! Cheveux tristes et longs, ils ont l’art du marchandage. Ils font semblant de s’intéresser énormément à une pièce, font baisser le prix pour finalement l’abandonner et en prendre une autre ce qui laisse brutalement le vendeur tellement au dépourvu, qu’il peut dire parfois un prix bien inférieur à la valeur de l’objet.
Une véritable stratégie comme celle qui consiste à dire : Je ne veux pas marchander les 40 euros que tu demande, Non ! Mais j’ai plus de sous et il ne me reste que 35. Ça marche ?
Puis il y a tous ceux qui jouent les acheteurs convaincus, ils marchandent âprement pendant de longues dizaines de minutes. Font semblant de partir, reviennent pour finalement ne rien prendre et s’en aller plus loin rêver qu’ils achètent une autre machine pendant le temps de leur pseudo marchandage.
La moyenne d’age est assez élevée, mais tous continuent à se berner en jouant leur personnage.
Les vrais marchands sont, eux aussi, des passionnés mais le business étant, ils sont plus pragmatiques et pressés. En même temps, certains peuvent parfois faire preuve de générosité avec les autres fanatiques lorsqu’ils sentent qu’ils ont affaire à un connaisseur.
Déjà, le vendredi soir ou le samedi matin à la première heure, aussi tôt leur camion déchargé les marchands font un tour de piste l’oeil vif de prédateur aux aguets, à la recherche d’une bonne affaire qui se négociera au cul du camion, comme on dit.
Il faut avoir fréquenté plusieurs bourses pendant plusieurs années pour les reconnaître. Mais s’ils sont démasqués, ils disent : Tu comprends, je la veux pour moi, cette bécane, j’en rêve depuis longtemps… Lorsque le marché est conclu, alors les motos ou les pièces changent d’emplacement avant l’arrivée des innocents collectionneurs.
Et le lendemain pièces ou motos sont sur un autre stand…et à un autre prix, bien entendu !
C’est la loi du commerce, il ne faut pas l’oublier…
Ainsi un amateur peut se faire avoir et vendre par méconnaissance à un prix trop bas.
Il me semble qu’on peut distinguer encore une autre catégorie de fanatiques des bourses de motos et de mécanique. Ce sont d’anciens coureurs ou mécaniciens de course qui probablement pleins de la nostalgie de leur jeunesse, reprennent la route avec leur camping-car ou leur caravane comme au bon vieux temps ou ils sillonnaient les routes d’Europe de course en course.
Cela me fait penser à des films comme le Voyage des comédiens, le film d’Angelopoulos, ou à Easy riders…Dans l’un l’errance de comédiens, dans l’autre des motards font la route.
Sur une bourse, on est tout à fait dans le mythe du road movie. Une étape entre deux poses, avec entre les deux, cette route, ce voyage dont on aimerait ne jamais voir la fin… Alors on continue malgré l’age qui avance et le temps qui passe inexorablement. Comme si de rien n’était de notre courte vie de papillon, on sort les motos et les pièces. On s’extasie devant les machines qu’on n’a pas pu s’acheter, il y a 20 ou 40 ans, on retrouve les amis. On se raconte les mêmes histoires en les revivant à chaque fois comme si c’était hier. Et l’on commente les projets, plein de restaurations nouvelles et futures à n’en plus finir.
Pour que le rêve ne s’achève pas…
Pourvu que ça dure…
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